Quand on a fait le grand saut de la vie, de sa vie, il n’y a plus de retour possible. Il faut avancer, monter, descendre, et recommencer….. . Il faut composer avec ses sensations contradictoires de plaisir et de terreur. Sans retour.

Les seuls moments où l’on peut échapper à cette fatalité, s’abstraire de ce mouvement perpétuel sont ceux que l’on nomme souvent « hors du temps ». Il peut s’agir d’une extase devant un paysage, d’une perte de moyen lors d’une rencontre amoureuse, ou tout simplement ce sentiment transperçant devant une œuvre d’art. Comme ces sauteurs à l’élastique qui connaissent la terreur de la chute suivie de la joie de l’apesanteur, il existe ce moment bref et sublime, entre la remontée et la nouvelle chute, où l’on flotte, rien ne bouge et on savoure le temps suspendu. Je le nomme lévitation. C’est du temps volé au temps. C’est aussi une belle métaphore de la photographie, moyen sublime de faire léviter la vie : qu’importe le chaos de l’avant ou la promesse d’amour de l’après, la photographie soustrait son sujet au continuum de la vie, elle le fait léviter pour toujours.